Performance
Durée environ 20 mn
Vue de l’exposition ROOM 237, cur. Anne Bourrassé, Galerie Bubenberg
Captation vidéo de la performance

© Contemporaines/Romain Rampillon
Extrait du texte de la performance
© Anna Ternon
«
(...)
Depuis qu’elle était descendue du bateau elle n’avait eu de cesse de penser à l’eau, l‘eau sous toutes ses formes. La mer, tout d’abord,
qui l’avait portée jusqu’ici. Puis l’eau qui sortait de son corps en perles de sueur, trempant l’arrière de son tee-shirt sous son sac à dos. Ensuite, en conséquence de toute cette eau perdue, était arrivée l’envie de boire, de se remplir de nouveau. Et pour finir, la mer, encore,
en arrière-plan, comme pour lui rappeler que ce qui l’avait amenée là serait toujours présent.
Elle ne projetait rien de ce qui allait se passer dans les prochaines heures ou les prochains jours. Elle ne pensait pas à la vie qui allait
se mettre en place dans ce nouveau lieu, aux rencontres qu’elle allait certainement faire, aux habitudes qui allaient doucement s’installer.
Les prochains jours lui apparurent comme tous identiques, avec ce même fond, au loin, la mer qui s’arrête comme une ligne. Les jours passèrent. L’appartement, la ville dans laquelle elle déambulait quotidiennement en empruntant chaque jour un chemin différent,
tout semblait figé, comme au jour du débarquement. Elle rencontrait des gens, de plus en plus, parlait quelques fois à ses voisins,
cinq minutes sur le palier. « Il a quel âge votre fils? », « vous connaissez l’ épicerie au bout de la rue ? » Tout se déroulait normalement,
dans un flux continu, sans accro. Il y avait pourtant toujours ce fond qui ne la quittait pas. Il s’était installé en même temps qu’elle
et semblait décidé à rester. Chaque nuit, des rêves aquatiques s’infiltraient dans son sommeil. Elle se mit à dormir sur le canapé du salon
en espérant que ses migrations nocturnes influenceraient ses rêves. Mais en vain. Elle commença à interroger les gens autour d’elle,
sans oser trop en dire. Elle leur demanda ce qu’il pensait de cette présence tout autour d’eux, s’il la trouvait pensante. Ses sondages laissaient ses interlocuteurs de marbre. Personne ne semblait comprendre où elle voulait en venir. Ils lui répondaient souvent à côté, que de toute façon, ils n’allaient pas tellement à la plage et encore moins faire du bateau. Elle devint presque agressive, il lui prenait parfois l’envie de les saisir par les épaules pour les secouer en hurlant : « mais vous en voyez pas le fond ?! ».
Peu à peu, l’angoisse se referma sur elle. Elle trouvait refuge chez elle en fermant les stores qui donnaient sur le lointain. Les rêves étaient toujours là mais ils prenaient une teinte différente, plus douce, peut-être plus enveloppante. Un après-midi, aux heures où la ville s’endort pour laisser la chaleur arpenter les rues, elle s’assoupit sur son lit. La mer vint de nouveau lui rendre visite pour lui proposer de la rejoindre. Séduite par cette hypothèse d’un corps à corps, elle regarda les horaires des prochains bus. Elle voulait arpenter la côte avant de choisir
le lieu précis de leur rencontre.
(...)
»
(...)
Depuis qu’elle était descendue du bateau elle n’avait eu de cesse de penser à l’eau, l‘eau sous toutes ses formes. La mer, tout d’abord,
qui l’avait portée jusqu’ici. Puis l’eau qui sortait de son corps en perles de sueur, trempant l’arrière de son tee-shirt sous son sac à dos. Ensuite, en conséquence de toute cette eau perdue, était arrivée l’envie de boire, de se remplir de nouveau. Et pour finir, la mer, encore,
en arrière-plan, comme pour lui rappeler que ce qui l’avait amenée là serait toujours présent.
Elle ne projetait rien de ce qui allait se passer dans les prochaines heures ou les prochains jours. Elle ne pensait pas à la vie qui allait
se mettre en place dans ce nouveau lieu, aux rencontres qu’elle allait certainement faire, aux habitudes qui allaient doucement s’installer.
Les prochains jours lui apparurent comme tous identiques, avec ce même fond, au loin, la mer qui s’arrête comme une ligne. Les jours passèrent. L’appartement, la ville dans laquelle elle déambulait quotidiennement en empruntant chaque jour un chemin différent,
tout semblait figé, comme au jour du débarquement. Elle rencontrait des gens, de plus en plus, parlait quelques fois à ses voisins,
cinq minutes sur le palier. « Il a quel âge votre fils? », « vous connaissez l’ épicerie au bout de la rue ? » Tout se déroulait normalement,
dans un flux continu, sans accro. Il y avait pourtant toujours ce fond qui ne la quittait pas. Il s’était installé en même temps qu’elle
et semblait décidé à rester. Chaque nuit, des rêves aquatiques s’infiltraient dans son sommeil. Elle se mit à dormir sur le canapé du salon
en espérant que ses migrations nocturnes influenceraient ses rêves. Mais en vain. Elle commença à interroger les gens autour d’elle,
sans oser trop en dire. Elle leur demanda ce qu’il pensait de cette présence tout autour d’eux, s’il la trouvait pensante. Ses sondages laissaient ses interlocuteurs de marbre. Personne ne semblait comprendre où elle voulait en venir. Ils lui répondaient souvent à côté, que de toute façon, ils n’allaient pas tellement à la plage et encore moins faire du bateau. Elle devint presque agressive, il lui prenait parfois l’envie de les saisir par les épaules pour les secouer en hurlant : « mais vous en voyez pas le fond ?! ».
Peu à peu, l’angoisse se referma sur elle. Elle trouvait refuge chez elle en fermant les stores qui donnaient sur le lointain. Les rêves étaient toujours là mais ils prenaient une teinte différente, plus douce, peut-être plus enveloppante. Un après-midi, aux heures où la ville s’endort pour laisser la chaleur arpenter les rues, elle s’assoupit sur son lit. La mer vint de nouveau lui rendre visite pour lui proposer de la rejoindre. Séduite par cette hypothèse d’un corps à corps, elle regarda les horaires des prochains bus. Elle voulait arpenter la côte avant de choisir
le lieu précis de leur rencontre.
(...)
»